A la manière de Contrex ou de Patrick Cohen, dans « C à vous », il y a trois bonnes raisons d’aller voir « Le cours de la vie »


Première raison
Il n’est pas si fréquent vous en conviendrez d’entendre dans les dialogues d’un film grand public les concepts « d’habitus » et de « point de démence ». Le premier cher à Bourdieu : qui pour rappel répond à cette définition « ensemble de dispositions durables et transposables structures structurées à vocation structurantes qui agit comme un oubli de l’histoire incorporé inconsciemment » même s’il est plus facile d’évoquer le concept que de placer la définition dans une soirée entre potes le film évoque clairement son usage dans l’écriture d’un scénario et son poids dans la représentation des itinéraires des différents personnages. Faire le choix du fond avec une forme accessible sans vulgarisation simpliste Jaoui nous y a habitué.

Le deuxième, développé par Gilles Deleuze « Le point de démence de quelqu’un c’est la source même de son charme. Si tu ne saisis pas le grain de folie chez quelqu’un, tu ne peux pas l’aimer. » Une lecture plus psychologique que sociologique qui insiste sur la limite des critères (sociaux et rationnalisés) garantissant les conditions d’un sentiment amoureux partagé. Ce qui revient à aimer l’autre malgré ses défauts.


Deuxième raison
Le scénario du film s’inscrit dans la lignée des « et si », qui pour les cinéphiles ou les plus anciens rappellent le « Smoking non-smoking » d’Alain Resnais, ou les hypothèses de Lelouch façon « Des nuits et des lunes » ou encore « L’effet Papillon » d’Éric Bress. Sans oublier un clin d’œil à Sollers qui nous propose deux romans sans ponctuation dans une forme d’interaction très particulière de sorte qu’on ne lit pas la même chose selon la ponctuation qu’inconsciemment nous mettons en place. Chez Frédéric Sojcher le « et si » est traité avec beaucoup de finesse, donc d’efficacité en nous transportant sur porte bagage de son vélo jusqu’à la dernière scène. Ce jeu du « et si » réactive nos propres questionnements sous formes de doutes ou de réassurances sans jugement ni discours moralisant dans le film. Le cours de la vie n’est jamais un cours sur la vie. Merci pour ça.

Enfin en trois ce film a mis longtemps à se monter et à finir par accoucher d’un projet au budget limité. Il mérite d’être défendu face aux déferlantes américaines. Sa galerie de portraits incarnée par les jeunes talents de l’école de cinéma nous offre une mosaïque de regards et de postures tout en nuances.

Je sais Indiana Jones arrive et va nous faire ses adieux mais il peut attendre le temps d’aller voir « le cours de la vie » bientôt chassé face à la terrible concurrence des sorties sur les plateformes qui limitent les durées de vie en salle

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